Après une partie de tétris qui s'est étalée sur plusieurs jours, les bagages sont enfin bouclés (44 kilos en soute ! ouf, je suis large ! :) - sachant que l'on a droit à 45 kilos... hem), les affaires sont sagement rangées dans leurs compartiments respectifs que je ne suis pas prête de rouvrir (au risque de voir chaque sac vomir littéralement son surplus de vêtements et objets de vie en tout genre). Finalement, préparer son sac pour vivre treize mois à 3500km du centre commercial le plus proche, ça s'est avéré être le plus gros casse-tête de ces dernières semaines (pour être honnête, j'étais beaucoup plus à l'aise dans l'apprentissage de l'arrachage de dents)
Passons sur ces considérations toutes matérielles. L'important aujourd'hui, c'est surtout que nous avons atteint l'objectif. Ce qui n'était rien de plus qu'un petit point sur l'horizon il y a un an, et que l'on est resté à fier pendant de longs mois, à regarder si intensément à s'en décoller la rétine. Des semaines entières à rêver, imaginer, parfois appréhender ce fameux 29 novembre 2011.
Les jeux sont faits, rien ne va plus. Dans exactement 4 heures l'avion décollera de Roissy, direction La Réunion. A son bord, quatre médecins fébriles et impatients de débuter leur nouvelle mission. Mais surtout quatre rêveurs qui ont eu la folie (et beaucoup appellent ça le courage - mais est-ce vraiment du courage de vouloir vivre son rêve ?) d'aller au bout de leurs idées farfelues. Je suis tellement heureuse de faire partie de ces quatre chanceux.
Et pourtant...
Pourtant je ne réalise pas vraiment. Les dernières semaines se sont écoulées paisiblement, et hormis un passage à vide de sept jours d'angoisse inexpliquée, depuis dix jours je vis chaque minute sans vraiment réaliser ce qui m'arrive. Un à un les au revoirs se sont égrénés avec la famille, les amis, les collègues. Tout autant de moments qui font prendre conscience de l'absence prochaine, du manque immense qui va s'installer progressivement. Mais pour le moment, je ne suis ni inquiète, ni mélancolique, ni excitée, ni triste.
Aucune larme dans tous ces derniers regards échangés (et ça n'est pas faute d'en avoir à revendre !)comme si je ne comprenais pas encore que c'était pourtant la dernière occasion qu'il m'était donné de partager ces si délicieux moments qui m'ont été offerts par vous tous qui m'accompagnez depuis si longtemps dans ce projet.
Alors merci, merci, merci, et, au risque de me répéter, encore mille autre mercis. Je n'arrive peut-être pas encore à le montrer, combien vous allez me manquer. Mais tout cet amour qui m'a été offert, que vous m'avez donné la chance de ressentir, je l'emporte avec moi vers cet ailleurs dont j'ignore encore presque tout - et fort heureusement, ce bagage là ne prend ni poids ni volume, mais c'est de loin le plus précieux !
J'espère vraiment, par ce site, pouvoir vous faire partager cette aventure exceptionnelle, vous emmener avec moi vers ce bout du monde. Et vous inonder de messages et de photos, tels des bouteilles jetées à la mer, qui pour une fois seront assurées d'arrivées à bon port.
Je finirai ce dernier message métropolitain avec une citation
offerte par une amie, et surtout cyclo-voyageuse extraordinaire :
" La sagesse, c'est d'avoir des rêves suffisamment grands
pour ne pas les perdre de vue quand on les poursuit"
(Oscar Wilde)