Jeudi 17 mai – Demi-tour du lac à malices
La tempête de la veille a bien nettoyé le ciel, et lorsque
je sors un œil de sous le duvet au matin, un beau coin de ciel bleu brille
derrière la fenêtre. Quel plaisir de s’éveiller sans réveil, après une bonne
nuit ininterrompue (pas de vent, pas de ronflement – parfait !). Après un
solide petit-déjeuner, nous quittons la cabane en direction du Lac Korrigans.
Pour les bretonophobes ou les bretonincultes, les Korrigans
sont des lutins (et non pas des nains) farceurs et malicieux (et non pas
maléfiques) habitant les étendues de landes en Bretagne (surtout autour du
Château de Dinan, sur la presqu’île de Crozon, où ils ont sauvé les habitants
de la menace des géants). Farceurs, ils passent leurs nuits à danser et jouer
des mauvais tours aux marcheurs noctambules (souvent alcoolisés, ce qui
explique l’inexactitude de leurs récits), mais aussi parfois en les
récompensant s’ils ont su se montrer talentueux (surtout à la musique, dont ils
raffolent). Bref, je trouve plutôt amusant de retrouver ce petit bout de tradition
bien de chez moi ici, à 13 000km, au fin fond d’un fjord des Kerguelen.
Surtout quand l’on sait que cette année c’est un corse qui habite ici une fois
par mois ! :-)
Mais revenons à nos pas, ou plutôt à nos bottes, qui nous
conduisent vers la rivière Korrigan que nous traversons juste avant
l’embouchure afin d’obliquer vers le sud pour monter sur un plateau humide où
les seules traces de vie que nous croisons sont un groupe de canards d’Eaton
s’envolant à notre approche.
Traversée de la rivière Korrigan au petit matin
avant de monter le col visible à l'angle gauche de la photo
Pas un souffle de vent, quelques gouttes de pluie
éparses, un chaud soleil qu’il est agréable de retrouver, les conditions sont
idéales. Si bien qu’il faut vite se découvrir, excellent prétexte pour
profiter de la vue que nous offre le passage d’une première barre rocheuse.
Derrière nous, la plaine humide étire ses étangs et bras de cours d’eau
scintillant au soleil, tandis que devant nous apparaissent les premiers recoins
bleu clair du lac Korrigans.
A l’inverse du Lac Eaton qui était quasi
circulaire comme comblant le fond d’un ancien cratère, celui-ci est complexe,
ses multiples bras serpentant entre ilots et pieds des pics rocheux, dont il
semble vouloir chatouiller les orteils. Si
bien qu’il est difficile de dire où il commence et encore moins où il finira.
En tout nous passerons quatre heures à arpenter son rivage
sud, profitant des sursauts du relief pour explorer quelques grottes de roche
rouge plus friable creusée par les infiltrations d’eau, ou bien ce petit sommet
fait de cette même roche rouge dont l’écoulement a creusé d’étranges
champignons surmontés d’un chapeau de roche plus dure.
Séance de cache-cache entre les blocs rouges
Nous ne marchons pas
vite, profitant du paysage et de la possibilité de faire des photos à l’envie,
si bien qu’au moment de faire demi-tour, nous n’aurons parcouru que le premier
tiers du lac.
Ecume d'eau douce
Nous revenons sur nos pas en longeant les barres rocheuses au
plus près afin de profiter de la vue depuis les hauteurs, puis rejoignons le
rivage du lac afin d’atteindre son embouchure est.
Une sortie en manip’ n’en
étant décidément pas réellement une si Bibette ne se retrouve pas
ensouillée ; ainsi, parvenus à quelques mètres du bord je me sens
subitement aspirée par le sol. Eclats de rire de mes collègues qui sortent
aussitôt leurs appareils photos pendant que je tente de m’extirper de la
souille qui m’a avalée jusqu’au haut de la cuisse. Encore une bonne occasion de
se faire remarquer, jusqu’à ce que LaLa vienne « héroïquement » me
sortir de là, non sans être plié en quatre.
Bibette - ou l'art de s'embourber jusqu'à la taille....
La jambe gauche toujours
dégoulinante de boue, nous atteignons enfin l’extrémité est du lac. De là
s’écoule la rivière Korrigan, dont nous suivons les quelques méandres qui
serpentent entre les rochers puis nous conduisent jusqu’à la cabane.
Le soleil descend déjà à l’horizon (les
journées sont de plus en plus courtes, la VAC de 17h30 se faisant désormais
dans la nuit noire) et nous nous glissons avec plaisir dans notre cocon
douillet de la cabane. Ou presque… je m’échappe au crépuscule pour passer encore
quelques dizaines de minutes dehors ; pendant
que LaLa et Papounet s’occupent de la VAC, je capture les
derniers moments de sérénité de la rivière Korrigan et du bord de mer en photo
longue pause, puis la nuit se referme sur nous.
......... puis la nuit se referme sur
nous.
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